Culture
Le roman graphique, à la croisée des chemins

Le roman graphique, à la croisée des chemins

YEPS Créé par YEP’S

Le roman graphique s’affirme dorénavant comme une forme d’art à part entière et tient, de nos jours, une place non négligeable dans les rayons des librairies.
Il mêle habilement illustrations et textes et s’inscrit à la croisée des chemins entre la littérature et l’art visuel.
Au fur et à mesure des années, les thèmes abordés, parfois sombres et complexes (« Maus » d’Art Spiegelman, « Persepolis » de Marjane Satrapi), les univers explorés (fantastique, autobiographique,…), les illustrations de grande qualité, ont contribués à établir le roman graphique comme un ouvrage sérieux qui attire, désormais, un large public.

Nayla, notre ambassadrice lecture, nous présente ses 2 romans graphiques coups de cœur : La Bibliomule de Cordoue, de Wilfrid Lupano et Léonard Chemineau, et Par la force des arbres, d’Edouard Cortés et Dominique Mermoux.

La bibliomule de Cordoue

De quoi ça parle  ?

Dans l’Espagne d’Al Andalus de 976, le pays connaît son apogée culturelle. Mathématiques ou philosophie, grec ou latin, le pacifiste Abd el-Rahman III avait tout mis en œuvre pour valoriser la culture avant de mourir. Son fils étant trop jeune, c’est le vizir Amir qui prend le pouvoir, et avec lui suit l’obscurantisme. Soutenu par des extrémistes, Amir va entreprendre l’autodafé de milliers de livres de la magnifique Bibliothèque de Cordoue, où se trouvent des exemplaires uniques d’œuvres majeures de la littérature.
Cependant, aidé par une mule très têtue, Tarid, bibliothécaire, Lubna, une esclave copiste, Marwan, un voleur, vont entreprendre le sauvetage de certains livres, au péril de leur vie.

Pourquoi lire ce livre  ?

La précision des dessins permet vraiment de s’immerger dans cette Espagne du Xe siècle. On a l’impression de suivre les personnages, les soutenir, tout en admirant l’incroyable architecture mauresque.
Le trio que nous suivons au fil du livre est atypique : entre l’humour de Marwan, la force et l’intelligence de Lubna, la volonté et l’empathie de Tarid, le lecteur n’a pas le temps de s’ennuyer ! Au fur et à mesure, on découvre de nouveaux aspects concernant le passé des personnages : le suspense est présent jusqu’à la fin. Ce qui est bien, c’est que le livre insiste sur le fait que l’Histoire n’est pas seulement œuvre des hommes, Lubna est une femme incroyable qui a vraiment existé.
La question du devenir des livres est très actuelle. Les écrans ne seraient-ils pas l’autodafé du XXIe siècle ? Ne sommes-nous pas en train de sombrer dans l’obscurantisme en digitalisant tout ce qui nous entoure ? Les livres, symboles d’éclairement, sont toujours les premières victimes des régimes autoritaires. Heureusement certaines personnes passionnées, des documentalistes aux libraires, œuvrent chaque jour, comme Tarid, pour la transmission du savoir par les livres.

« Plusieurs centaines de milliers…Tous uniques. Tous magnifiques. Tous annotés et commentés par les plus grands esprits de notre temps » page 93.

 

Par la force des arbres

De quoi ça parle ?

L’œuvre relate l’histoire d’Edouard Cortés, un paysan devenu dépressif à cause des conditions de son travail. Il décide alors de se reconnecter avec la Nature en habitant une cabane construite dans un chêne.

Pourquoi lire ce livre ?

Ce roman graphique nous dresse les portraits des oiseaux, cerfs, ou faons, mais aussi des petites bêtes et insectes, dont on croise le chemin chaque jour en les ignorant.
Edouard Cortés nous invite également à nous interroger sur la question du temps. L’Homme vit constamment dans une course inlassable avec le temps. La patience et l’instant figé sont des aptitudes propres à la contemplation de la Nature.

« La vitesse a rétréci le monde. En gagnant du temps, nous l’avons perdu. J’essaye de le suspendre un peu ».

Tous, nous rythmons nos vies sur un emploi du temps bien déterminé. Parfois, il faut savoir arrêter le temps pour mieux contempler nos alentours.
Les dessins sont juste magnifiques : le choix de l’aquarelle traduit à la fois un sentiment de bien-être et de légèreté mais également tout le système complexe représenté par les ramures des arbres.
Par la force des arbres est en ce sens, un véritable hymne à la Nature, chantant sa splendeur, ses secrets, et sa divinité. C’est une lecture reposante, dépaysante qui donne envie de laisser de côté « l’immédiateté » de nos vies, et d’aller prendre un peu de recul sur un arbre…

A l’image de Cortés qui évolue au cours des pages, on sort grandi de cette lecture.

 

(Re)lisez également notre article La bande dessinée bouscule les cases ! (nouvelle fenêtre) et Les Rendez-vous BD en région Centre-Val de Loire (nouvelle fenêtre).
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